Origine
La vouivre, qu’est-ce que c’est que cela ?
Vouivre provient tout simplement du latin vipera …. qui signifie serpent. Terme essentiellement utilisé en France, même si on le retrouve sous différents noms (guivre, ouivre, wiwvre, vuipre) dans d’autres régions d’Europe.
Vous avez déjà compris à quelle partie de la carte je me réfère.
Le serpent est ici maîtrisé, et non pas écrasé ou tué.
photo du dessus : Saint-Benoît sur Loire
Extension
Par extension, partout où nous voyons une femme au serpent dans une église, nous pourrons penser à la symbolique que je vais évoquer.
Surtout s’il s’agit d’une femme qui allaite des serpents.
Là où les chrétiens peuvent ne voir qu’une allusion à la luxure ou au péché originel, le Cherchant lira une allusion à la Vie qui coule dans le lieu.
photo du dessous: Manglieu – Auvergne
Légende
La vouivre est une superbe femme, qui vit, tapie au point de résurgence, au fond d’un ruisseau, au pied d’une cascade ou d’un arbre remarquable. Mi-femme, mi-serpent, elle vit en parfaite harmonie avec la nature et ne demande rien à personne.
Son front est orné d’un escarboucle… et c’est bien cela qui engendre des convoitises.
Par ailleurs, il est intéressant de noter que cet escarboucle est bien le seul élément qui la distingue fondamentalement des légendes de Mélusine et de la sirène celte.
Le rapprochement est donc pertinent.
L’escarboucle, c’est un rubis de haute valeur, dont la traduction est « éclat du charbon ardent ». Fruit de tous les phantasmes et de toutes les convoitises des humains.
* Pour les femmes, il représente la panacée en matière de guérisons (avec « s »).
* Pour les hommes, il est gage de pouvoir et richesse.
Bref, s’emparer de l’escarboucle de la vouivre devient une obsession pour tout villageois qui se respecte.
Amusant de constater que les oeuvriers s’amusent aussi avec ce thème, comme avec cette clé de voûte à Baume-les-Messieurs (photo ci-dessous).
Il y a donc quelque chose de caché là-derrière.
Symboliquement, l’escarboucle ôté, laisse la vouivre dans un état de pureté et d’innocence. Du coup, me voilà oser un petit paralèle osé avec la Justice et l’Etoile. Ben, quoi, je peux aussi fantasmer avec la légende, non ? Voir illustration ci-dessous.
Je me recadre : s’emparer de l’escarboucle semble facile aux hommes. A plus forte raison que la vouivre passe le plus clair de son temps à se baigner. Et que pour se baigner, elle ôte son escarboucle, faisant d’elle une créature vulnérable, une fois revenue sur terre.
Si un homme s’en empare alors, il possédera une femme aux charmes et à la beauté exquise. Mais qui exigera de son mari de ne jamais être regardée ou touchée au lit. Ce qui ne sera bien évidemment jamais respecté.
Le mari découvre alors la double nature de la vouivre. Celle-ci, à l’instar de Mélusine, s’envole alors, transformée en dragon ailé, à queue de serpent.
Derrière la légende.
Tout d’abord, elle se termine mal.
Décodée symboliquement, elle nous invite à prendre conscience qu’on ne maîtrise jamais les forces de la terre et que, tout au plus, on peut les domestiquer. Ensuite, la vouivre étant géographiquement localisée en des lieux énergétiquement forts, ces derniers représentent l’imagerie populaire en lien avec ces lieux. A la louche.
Je m’arrête là car sinon on est parti pour un livre sur le sujet, tant les vouivres et autres Mélusines sont déclinées de multiples façons.
A ce propos, et à mes yeux, une excellente référence sur le sujet demeure : La Vouivre, un symbole universel, de Appavou et Mougeot. Voir bibliographie.
Force est donc de constater que la vouivre, femme-serpent, nous replonge dans nos classiques et renvoie au mythe fondateur du Serpent Premier.
Du serpent premier
Chronologiquement situé en premier, Atman / Mâhâbhûtâ, le serpent à cinq têtes, créature Une et indifférenciée, sort des marais, se multiplie pour donner naissance aux hommes. Par la suite, il réapparaîtra, au moment où Siddhârta opérera sa transformation en Bouddha.
Tout comme en Egypte, Atoum, fruit du Noun, engendrera Shou et Tefnout. Non, je ne suis pas subitement pris d’un rhume, il s’agit bien de la base de la constitution de l’ennéade mythologique égyptienne. Shou étant l’Océan primordial, féminin, et Atoum le serpent solaire, masculin.
Serpent et eau sont présents dans les deux traditions.
Enfin, pour mes amis alchimistes, je n’hésite pas à établir un parallèle avec l’ouroboros, serpent alchimique, marquant la matière première. Et j’avoue que cette illustration est celle que je préfère entre toutes, avec cet être en devenir, encore tapi au cœur de l’œuf primordial.
La vouivre nous renvoie donc au mythe fondateur du serpent originel qui donne la vie. Du coup, Lilith n’est pas pas loin non plus. Ca y est, j’en vois qui frétillent. 😈
Maintenant que vous savez de quoi on parle, je vous invite à découvrir ici la vouivre dans les lieux sacrés.
Et puis – quand même ! – ce qu’elle vient faire dans la carte de l’Impératrice. Article ici.